...Jacques Necker naquit à Genève le 30 septembre 1732, d'une ancienne famille allemande. Appelé par les facultés qu'il reçut de la nature à l'étude et à la méditation, et destiné par sa naissance au commerce, il reçut une éducation qui développa en lui la capacité pour les affaires et les talens d'un écrivain philosophe. Envoyé fort jeune à Paris, et placé dans la maison de banque Vernet, il fut ensuite associé de la maison Thelusson, et y fit une fortune considérable. Il tourna alors ses pensées vers des objets d'intérêt public, fut nommé ministre de la république de Genève à la cour de France, écrivit en faveur de la compagnie des Indes et sur le commerce des grains, et remporta en 1773 un prix proposé par l'Académie Française pour l'éloge de Colbert. Désigné au gouvernement par la voix publique, il fut appelé en 1776 à prendre part à l'administration des finances du royaume, et l'année suivante devint contrôleur-général. Il donna l'exemple, inconnu jusque-là, et peu imité depuis, de refuser le traitement de cette place. Les nombreuses améliorations que cet homme d'Etat introduisit dans les différentes branches de l'administration publique, l'établissement des assemblées provinciales essayées en 1778, et enfin la publication du Compte rendu, élevèrent sa renommée au plus haut point, et lui valurent l'affection de la France entière. Brouillé avec Maurepas par suite d'intrigues, il demanda sa démission en 1781, mettant à la continuation de ses services quelques conditions qui furent refusées, au grand étonnement de l'Europe. Rentré alors dans la vie privée, J. Necker publia en 1784 son ouvrage sur l'administration des finances, dont il se vendit en peu de jours 80,000 exemplaires. Le ministre Calonne ayant annoncé aux notables qu'au lieu d'un excédant de dix millions, Necker avait laissé un déficit de cinquante millions, il publia une défense à cette attaque de Calonne, qui, pour toute réponse, le fit exiler, et fut bientôt renvoyé du ministère. L'archevêque de Brienne ne conduisit pas mieux les finances de l'Etat, et J. Necker fut rappelé en 1788, après la déclaration du Roi relative à la convocation des Etats-Généraux. Ce n'est pas ici le lieu de retracer les discussions relatives à la formation de ces Etats, et les reproches qui ont été faits à cet égard à J. Necker. Les antécédens et les nécessités de l'époque justifieraient, s'il en était besoin, un tel homme, dont les vastes lumières et la haute probité ne peuvent laisser de doutes sur les motifs qui le déterminèrent.
    On a lu dans les articles précédens les aperçus des premiers événemens de la révolution. Le 23 juillet 1789, J. Necker se décida, sur l'avis de ses amis intimes, à ne pas paraître à la séance royale où fut lue la déclaration du Roi, qui ne satisfit aucun des partis, et fut sans résultat. Il envoya sa démission après la séance, mais se décida à rester, sur les instances générales. Le 11 juillet suivant, il reçut du Roi l'ordre de donner sa démission, et de partir sans annoncer sa disgrâce à personne. Il obéit, et sortit de France. Rappelé par suite des événemens du 14 juillet et des jours suivans, il arriva à Versailles le 29 du même mois, et reprit le ministère des finances. Son retour et sa rentrée au ministère inspirèrent le plus grand enthousiasme.
    C'est à ces circonstances que se rapportent cette médaille et les suivantes, qui doivent donc être classées au 29 juillet 1789. Le nombre de ces pièces prouve quel était à cette époque l'enthousiasme des Français pour ce ministre, et l'espoir que l'on mettait en lui.
...Benjamin Duvivier avait gravé l'avers de cette médaille en 1788, et il l'avait fait frapper avec un revers relatif à la seconde rentrée de J. Necker au ministère, le 25 août 1788. Mais cette médaille n'avait pas été rendue publique à cette époque, Necker ayant mis, par modestie, des obstacles à cette publication. Cette pièce ne doit pas être rapportée dans cet ouvrage, puisqu'elle est relative à l'année 1788.
...Lors de la troisième rentrée de J. Necker au ministère, le 29 juillet 1789, Benjamin Duvivier fit un nouveau revers, portant les dates de ses trois divers ministères, et le fit frapper avec la tête qu'il avait gravée l'année précédente; c'est la pièce décrite dans cet article. B. Duvivier offrit cette médaille à l'Assemblée Nationale dès le 9 août, et il l'annonça par une lettre d'avis datée du 10 du même mois. Mais il parait que cette annonce ne fut rendue publique qu'au commencement d'octobre (*). Cette publicité blessa encore la modestie de J. Necker, et peu de jours après, B. Duvivier annonça, par de nouveaux avis imprimés, que le ministre avait exigé la suppression de la médaille quelques jours après sa première publication, et qu'il ne pouvait en conséquence plus tenir la parole qu'il avait donnée au public pour la vente de cette médaille (**).
...Cette pièce fut depuis mise en vente de nouveau, et l'on a vu, à l'article de la pièce N°. 37, que B. Duvivier offrit à l'Assemblée générale des Représentans de la Commune de Paris les coins de cette pièce, dont il faisait don à la Commune.

(*) Journal de Paris du 6 octobre 1789
(**) Idem du 10 octobre 1789.